Humeur

Le jeu ordinaire (et ses vicissitudes) : écrire à nouveau

En ce lundi de février, le printemps bouscule les conventions. La météo est douce, les oiseaux chantent, les rayons de soleil percent, le parquet s’illumine. Les effets sont à vrai dire très convaincants. On sent que l’éditeur a mis le budget. Printemps 2019 s’annonce d’ores et déjà prometteur.

Happé par une telle authenticité, je me prendrais à rêvasser – Ah ! Flaner dans les rues peut-être. Me détendre avec de la lecture dans un fauteuil. Reprendre le texte. La liste des peut-être et des on-se-dit-que, poussés aux fesses par les effets printaniers, ça se veut par nature aussi enchanteur qu’improbable. Mais parfois, l’esprit, ce gaillard, tout disposé qu’il est à penser, et en particulier à s’imaginer faire, a besoin de ce sursaut de bien être pour concrétiser l’affaire.

Ça fait quelque temps que je n’ai plus fait ça. Que je ne me suis plus prêté à cet art délicat de donner du sens aux mots. Art qui m’a toujours échappé, mais qu’au moins je chauffais, je travaillais, je forgeais, quitte à me bruler. A l’heure où j’écris ces lignes, mon dernier texte, qui portait sur Hellblade, remonte à quasiment un an et demi. Je n’ai pas encore osé le relire. Mais à quelques brouillons près, il n’y a rien eu de probant depuis. Pour parler vrai, cette pause m’a fait du bien. Je suis passé par bien des états d’âme avec le Johnnys. Mes derniers choix dénotant une volonté de me faire discret, de me raréfier tout à fait. Ce qui était déjà une façon de prendre de la distance. De fait, il m’était devenu difficile de tolérer internet, et de filtrer ses mauvaises façons. Je pense notamment aux minorités bruyantes, et à leurs modes de relation dérangeants : communautarismes suintants, mentalité de groupe, opinions péremptoires et autres gourroux du jeu vidéo.

C’est ce qui m’a amené à changer de compte Twitter, puis à opter pour un nom différent. Le Johnny’s Game Logs, en lieu et place du Johnny’s Game Café, c’était une façon d’être plus proche de ma vocation, de mes envies. Ce faisant, je me suis égoïstement réfugié dans l’intimité de ma propre opinion, que je savais superflue. Et parce que je la savais superflue, j’étais obsédé de la taire le plus possible. Naturellement, ces deux décisions m’ont couté. De rares et précieux lecteurs, déjà. Et puis l’envie. Parce qu’au final, elle n’était plus là. A trop me préoccuper de ce qui gravite autour, j’ai fini par perdre mon objectif de vue : raconter le jeu vidéo.

A côté de ça, je n’avais pas non plus anticipé à quel point ma vie allait changer. J’ai troqué, en l’espace de quelques années seulement, une carrière d’inactif « aspirant à » pour une carrière de fonctionnaire territorial. J’ai repris goût au travail, aux journées bien remplies. J’ai aussi rencontré quelqu’un qui me complète merveilleusement. A l’insouciance perdue j’ai donc troqué tout un tas d’impératifs et de responsabilités. Parce que ma vie est désormais plus stable, elle est aussi plus mouvementée. Le travail, et ses trajets y prennent une place prépondérante. Puis vient la vie à deux. Et enfin les petits chez soi. Dans les petits espaces, je m’évertue à jouer avec un plaisir retrouvé. Car il est vrai que j’ai toujours cette même affection pour les jeux vidéo. Et que leur absence se fait parfois sentir.

Dans les quotidiens mouvementés, ma façon de jouer s’est toutefois radicalement transformée. Pour commencer, ma passion pour les RPG a pris du plomb dans l’aile. J’ai beau le vouloir : je ne parviens plus à les terminer. C’est frustrant. J’en viendrais presque à apprécier l’idée de tomber malade, pour jouer toute la journée l’esprit hagard à Persona 5 et autres Valkyria Chronicles 4. Mais pour être franc, je ne sais pas si j’en serais physiquement capable. (C’est que ma vue a baissé !) Je me suis donc réfugié dans des formats plus courts, et plus transportables. Quelques jeux d’aventures (God of War, Tomb Raider), des jeux 3DS (Bravely Default, Luigi’s Mansion 2) ou sur PC (DOOM, Darkest Dungeon, Pyre, Frostpunk) me permettent d’obtenir mon fix. En attendant plus de stabilité.

Le petit plus, c’est le jeu en couple. Ma dulcinée étant débutante en la matière, je me suis orienté vers des formats courts et accessibles. Nous avons eu l’occasion de terminer Overcooked, puis Overcooked 2, que nous attendions de pied ferme, ainsi que Human Fall Flat, qui s’est avéré plus… « stressant » qu’escompté ! (De la difficulté de lever les bras.) Don’t Starve Together, habilement traduit « Ne pas mourir de faim », s’est avéré assez prenant, même si on meurt un peu trop, et qu’on peine à passer l’hiver. Detroit : Become Human, dernièrement, est venu apporter une pointe de réalisme et d’enquête, dans un format plus cinématographique. Enfin, divers party game terminent d’ajouter une dose de fun et de légèreté : Puyo Puyo Tetris, Mario Party 10, Wii Sports, Scene It?, parmi d’autres.

En somme : ça va. Je m’estime même chanceux – on a tendance à l’oublier, ou à ne pas s’en rendre compte. J’espère que de votre côté les choses vont également. Que vous trouvez le temps de jouer. Oh, d’ailleurs, en parlant de jeu, je vous ai pas dit : je me suis monté un nouveau PC. Plutôt correct. Mais ça, on en parlera plus tard. Le sujet est encore sensible.